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Le Corbusier : aux origines du mobilier moderne français

Le 11/06/2021

Dans Styles de mobilier

Découvrez l'art de Le Corbusier, le maître de l'architecture contemporaine française. Monsiege.fr retrace son histoire et ses plus grands succès. 

Le maître de l’architecture contemporaine française

Il est difficile de définir l’art de Le Corbusier tant l’homme fut à la fois touche à tout et prolifique. Architecte, designer, peintre, écrivain, dessinateur technique, décorateur, sculpteur, cet urbaniste eut très tôt la conviction que, pour atteindre son but, il lui fallait maîtriser son sujet dans sa globalité. 

Le corbusier aux origines du mobilier moderne

La jeunesse d’un architecte visionnaire

De sa Suisse natale à la France qu’il adopta comme patrie de cœur en 1930, le parcours du futur maître de l’architecture moderne française fut jalonné d‘embûches. Que reste-t-il de nos jours des quelques 17 grands chantiers et réalisations qu’il mena à leur terme dans le monde dont 10 en France ? Des bâtiments qui surprennent par leur modernité et s’inscrivent plus naturellement que jamais dans le paysage urbain. Mais Le Corbusier représente surtout un mouvement artistique à lui seul, la figure de proue d’un art moderne à la française, d’une vision de l’architecture qui se voulait comme un ensemble cohérent. Il ne fit pas que bâtir, il initia un renouveau de la décoration et de l’ameublement intérieur. Entre des débuts difficiles, l’incompréhension de ses contemporains et un succès international, Le Corbusier laisse une empreinte que l’on retrouve tant dans la Villa Savoye que dans des modèles de chaises et de fauteuils inspirant encore des générations de designers.

Les débuts difficiles d’un artiste pluridisciplinaire audacieux

Le Corbusier, de son vrai patronyme Charles-Édouard Jeanneret-Gris naît en Suisse à la fin du XIXe siècle. La tradition familiale le destine à l’horlogerie, plus exactement au modeste métier de graveur-ciseleur. Parallèlement, sa mère, musicienne, lui enseigne le piano, élément majeur qui lui donne rapidement le goût des arts. Élève studieux mais peu passionné par ce travail répétitif et peu créatif, il se fait remarquer à l’âge de 15 ans lors de l’exposition des arts décoratifs à Turin. Dans le même temps, une entrave majeure balaie son avenir tout tracé de graveur : sa vue se dégrade et bientôt il ne voit plus que d’un œil. Il aime le dessin, seul aspect purement artistique de son apprentissage. Le directeur de son école lui offre d’intégrer l’école d’art de La-Chaux-de-Fonds. Le jeune homme se rêve peintre mais ses modestes progrès poussent ses professeurs à l’orienter plutôt en architecture et décoration. Il obtient alors l’opportunité de travailler à la décoration d’une villa toute neuve sous la direction de l’architecte Chapallaz. Les prédispositions du futur maître architecte se tournent déjà vers la pure simplicité et un attachement stricte aux formes géométriques. Audacieux, le jeune Jeanneret utilise l’argent gagné pour quitter école et famille et partir à la découverte de l’Europe. Durant son voyage, tout l’inspire et plus particulièrement l’art médiéval. En escale prolongée à Paris, il rencontre l’architecte Eugène Grasset qui l’encourage à apprendre le dessin technique et les rudiments de l’architecture en béton armé. Il entre alors dans un cercle de rencontres enrichissantes, entre France et Allemagne, et croise, entre autres, les jeunes Walter Gropius et Van der Rohe, futurs fondateurs du Bauhaus.

Lorsqu’il rentre en Suisse, c’est pour réaliser sa première construction, la Villa Blanche. Destinée à ses parents, elle lui permet de mettre en application les prémices de son système Dom-Ino. L’idée repose sur une combinaison d’éléments de bâti standardisés et dont l’assemblage créé une structure de base indépendante du plan intérieur de l’habitat. Ainsi, toute liberté est offerte à l’agencement interne qui n’a plus à se soucier des questions de murs porteurs, etc. L’espace est alors disponible pour tout aménagement et mise à disposition d’ouvertures sur l’extérieur. La luminosité est au cœur de l’habitat.

Jeanneret devient Le Corbusier

Pour le futur maître, la Première guerre mondiale et les dégâts qu’elle provoque en France sont l’occasion de rebâtir autrement, avec des nouveaux matériaux et une toute autre perspective. Mais le succès n’est pas au rendez-vous. Paris, ville d’arts et de culture, n’est pas encore prête à abandonner le conformisme architectural dominé par des corporations. D’ailleurs, Jeanneret n’a toujours pas de diplôme officiel… Qu’importe ! Il s’installe dans la capitale et ouvre un premier atelier d’architecture. Sa première vraie collaboration se fait avec le peintre Amédée Ozenfant. Ils initient le purisme, prônent un retour à l’ordre en opposition aux fantaisies cubistes ou futuristes. Pour eux, de l’ordre naît le bien-être. Cette sobriété se base sur l’abstraction, la rigueur des formes géométriques, l’illustration par des couleurs types, souvent primaires. Ce mouvement d’avant-garde ne rencontre guère d’écho dans une Europe dévastée. L’époque des vaches maigres débute pour cet artiste qui, faute de mieux et surtout de commandes pour son atelier, se prête à de nombreux autres emplois. Cette variété de postes lui permet de tenir financièrement mais aussi d’apprendre tous les métiers et savoir-faire qui gravitent autour de la construction. Pour garder intact sa motivation et tenter de diffuser sa vision, il écrit et publie, sous le pseudonyme de Le Corbusier, des écrits dans sa Revue Nouvelle. Sa passion le pousse à multiplier les articles et à exposer ses convictions jusque dans son iconographie personnelle : lunettes rondes, costume strict, nœud papillon sans motif.

Le meuble contemporain façon Le Corbusier

Fort de ses convictions, le maître saisit chaque occasion de développer son art. La vague d’un art contemporain qui réunit artisanat, architecture, décoration et mobilier bouscule les mentalités en sa faveur. 

Le succès d’une architecture moderne

Le vent tourne lorsqu’en 1922 son cousin, Pierre Jeanneret le rejoint à Paris. Il est diplômé en architecture et cela permet enfin à Le Corbusier d’ouvrir une agence digne de ce nom. Dès 1925, il se lance dans des participations à des expositions et commence à concevoir des équipements d’habitat en accord avec ses créations architecturales. La première grande reconnaissance surgit avec la publication d’un recueil de ses articles précédemment édités en revue. Son ouvrage intitulé Vers une architecture est un succès éditorial spectaculaire basé sur le rejet de l’ornementation décorative et la démonstration de son principe des 5 ordres indispensables :

  • le soleil ;
  • l’espace ;
  • les arbres ;
  • l’acier ;
  • le ciment armé.

Ceux-ci doivent être associés aux 5 points architecturaux suivants :

  • les pilotis ;
  • le toit-terrasse ;
  • le plan libre ;
  • la fenêtre bandeau ;
  • la façade libre.

Les décennies 1920-1930 sont pour Le Corbusier le début de la consécration. Il élabore de nombreux projets qui, s’ils ne sont pas tous construits ou aboutis, représentent ses vrais débuts et l’aboutissement d’une réflexion qui l’obsèdera toute sa vie. Le style corbuséen se décline à travers :

  • le lotissement de Liège ;
  • la villa du lac ;
  • la maison Roche ;
  • le pavillon Nestlé à la Foire de Paris de 1927 ;
  • la villa Stein ;
  • la ville Savoye à Poissy ;
  • etc.

Mais Le Corbusier ne souhaite pas s’arrêter au bâti. Comme ses confrères du Bauhaus, il conçoit l’habitat comme un tout, meublé de sièges, de fauteuils, de tables dont les lignes sont en parfait accord avec les lieux.

Charlotte Perriand : l’indispensable designer en équipement de l’habitat

C’est durant cette période que Le Corbusier prend contact avec des fournisseurs de meubles et des designers spécialisés. La maison Thonet l’intéresse. Elle créé déjà des chaises aux formes audacieuses, ainsi que des tables et des casiers à piètement en acier très en vogue au niveau international. Il rencontre aussi Charlotte Perriand qui partage sa vision de l’habitat et du mobilier moderne. De formation très académique, elle s’est tournée vers les nouvelles théories d’une architecture moderne équipée de mobilier adapté avec en ligne de mire :

  • la fonctionnalité des matériaux,
  • le souci de loisirs et de bien-être ;
  • l’importance de s’orienter vers le logement social.

Le mobilier a très tôt inspiré cette créatrice qui s’était fait connaître à 24 ans pour son « bar sous les toits » garni des guéridons, de tabourets bas, d’un bar avec banquette. L’ensemble était conçu dans des matériaux nouveaux promis à un bel avenir :

  • piètements cruciformes ou circulaires ;
  • acier chromé et aluminium anodisé et verre.

Sa collaboration avec Le Corbusier et son cousin Pierre Jeanneret dure 10 ans. En accord complet avec les souhaits du maître de la rigueur et de la sobriété, leur équipe fait émerger de nombreuses créations fabriquées ensuite par Thonet :

  • la table extensible Ospite en acier chromé, bois laqué, support déroulant en caoutchouc ;
  • le tabouret pivotant LC8 ;
  • un siège pivotant LC7 en acier chromé et cuir ;
  • un guéridon en acier chromé et plateau de verre.

Responsable du mobilier et de l’équipement, Charlotte Perriand apporte à la réalisation de la maison Le Corbusier ses modèles les plus connus à ce jour :

  • la chaise longue LC4 ;
  • le fauteuil à dossier basculant LC1 ;
  • le fauteuil grand confort ;
  • la table LC 10-P en tube d’acier et verre ;
  • la table à piètement ovoïde LC6 mélange tôle d’acier laqué et petite amortisseurs caoutchouc portant le plateau de verre ;
  • des meubles casiers.

Le Corbusier : un habitat équipé et meublé aux quatre coins du monde

Les crises se succèdent dans le monde, et chaque fois, l’architecte y voit une opportunité de pousser toujours plus avant sa vision d’une nouvelle manière de penser l’habitat. La crise de 1929 est pour lui l’occasion de revoir l’accroissement de population en milieu urbain. Sa grande idée de villa radieuse naît dès cette époque afin d’offrir un lieu de vie qui combine les quatre fonctions nécessaires au bonheur de ses semblables : habiter, travailler, se cultiver (le corps et l’esprit) et circuler. S’il ne fait pas encore le poids face à ses confrères d’outre-Atlantique, il est tout de même invité à New York par la fondation Rockfeller et fait une tournée de conférences au Brésil. Il faut dire que son agence accueille et forme de jeunes talents du monde entier. De plus, alors que la crise frappe la France et que nombre d’architectes peinent à remporter des commandes, ce n’est pas le cas pour Le Corbusier qui travaille à bas coût. Usant de matériaux robustes et d’une technique permettant de les mélanger à d’autres plus prisés, il peut bâtir en béton armé, maçonnerie, pierres, briques de verre, panneaux de bois, etc. L’originalité est au rendez-vous mais s’adapte surtout au budget des commanditaires comme à leurs goûts. Même la CGT l’invite à exposer ses idées face à ses membres captivés par cet homme qui prône une architecture sobre et accessible à tous.

La Seconde guerre mondiale bouleverse autant sa vie que celle de bon nombre de français. Après avoir fui dans le sud, il revient en zone occupée, persuadé qu’il peut hâter la révolution industrielle de l’habitat. Aveuglé par sa vision, il ignore sciemment le régime politique du moment et ses répercussions. Cela lui vaut des inimitiés lors de l’épuration dont seule l’amitié d’André Malraux permet de le préserver. Le Corbusier est opiniâtre et entêté. Plus encore qu’en 1919, il voit l’urgence de rebâtir et sait que ses techniques, son art du bâti sont prêts pour ces temps de renouveau. Il faut reconstruire en pensant aux gens, pour leur l’espoir. Sa cité radieuse à Marseille en est le projet le plus abouti. Cet immeuble d’habitations est installé sur pilotis. 360 appartements en duplex auxquels on accède par des rues intérieures. À mi-hauteur, on trouve tous les équipements nécessaires à la vie en communauté : commerces, hôtel, restaurant, librairie, etc. Sur le toit-terrasse laissé en libre accès sont ouverts des structures publiques : école maternelle, gymnase, piscine, piste de course, auditorium en plein air.

Jusqu’à sa mort, en 1965, sa notoriété l’envoie également bâtir tout autour du globe : Bergame, Bogota, Inde, USA, Japon.

L’héritage de l’esprit corbuséen 

Dès ses débuts, Le Corbusier s’attacha à un courant artistique rejetant les anciens codes. Comme les Impressionnistes avant eux, les partisans de l’Art déco, du Bauhaus puis d’un art moderne puriste se tournèrent vers une parfaite corrélation entre le fond et la forme, encouragés par l’apparition de nouvelles matières et de l’industrie de fabrication en série. Coûts, rapidité d’exécution, quantité, matériaux différents, cette production est alors incompatible avec une décoration ornementée. Le Corbusier a compris très tôt combien le XXe siècle serait une période prolifique de progrès social et matériel à condition de suivre la bonne direction idéologique et pratique. L’ascétisme, la rigueur qu’il appliqua à sa vie et voulut exprimer dans ses créations servaient une vision en avance sur son temps : placer l’homme au cœur d’un lieu fait pour la lumière, l’espace, le jardin, grâce à des matériaux comme l’acier et le ciment armé qui permettaient le plan libre. À l’image d’une bonne chaise ou d’un fauteuil de bureau performant, son grand principe architectural reposait sur le couple piètement-support. Les planchers étant supportés par de fins poteaux disposés en trame, les façades étant libérées de leur fonction structurelle, l’organisation intérieure était libre. Cette absence de division d’espace par des murs porteurs et la totale liberté d’aménagement mobilier est aujourd’hui la règle d’or des open spaces, répondant à l’esprit de simplicité fonctionnelle et de durabilité structurelle. La chaise longue LC4 et le fauteuil à dossier basculant LC1 alliant confort et allure design, piètements chromés et revêtements cuir en sont aussi la parfaite illustration, sans cesse copiée et réinventée.

Le Corbusier est la figure emblématique d’un art moderne français qui explosa après des décennies d’hésitations et de tâtonnements. Entre rupture mal acceptée avec les anciens codes et révolution majeure des mentalités, son architecture, son art du mobilier ont finalement posé les bases d’un design devenu omniprésent.